Institut recherche jacquaire (IRJ)

Un pèlerinage pénitentiel commué, étape n° 16


Rédigé par Denise Péricard-Méa le 1 Avril 2020 modifié le 2 Avril 2020
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L'étape 12 nous a permis de croiser de pauvres hères, condamnés à un pèlerinage pénitentiel pour avoir tué un abbé menteur qui cherchait à leur voler des terres. Nous changeons aujourd'hui de classe sociale à la rencontre d'un vrai mauvais garçon.



Un fils de famille dans la bande à Villon

Portrait suppposé de François Villon
Portrait suppposé de François Villon

Regnier est « escholier » à Paris, au XVe siècle. Laissé à lui-même il fréquente les groupes d’étudiants turbulents qui troublent gravement l’ordre public. Parmi eux, le poète François Villon. En 1452, Regnier est banni pour avoir rossé deux sergents du guet à la porte de « l’ostel de la grosse Margot ». Il quitte Paris et continue ses méfaits. Il est emprisonné successivement à Rouen, Tours, Bordeaux, Poitiers, chaque fois pour des délits différents, vols dans les églises, achats frauduleux, tricherie au jeu.

Regnier de Montigny est fils de Jean de Montigny, pannetier du roi. Il  avait suivi Charles VII, « petit roi de Bourges », dans son exil. Né à en cette ville en 1429,  Regnier  y vécut jusqu’en 1437, date à laquelle sa famille suivit le roi qui rentrait à Paris. Pendant l'exil, son père avait tout perdu de ses biens parisiens. Il en mourut de désespoir, laissant une famille dans le besoin. C'est ainsi que Regnier s'est retrouvé à la rue, fréquentant les mauvais garçons.


Clémence royale pour le fils d'un noble serviteur

Ses séjours en prison ne l'amendent pas et il poursuit ses méfaits, jusqu'à être compromis dans un meurtre. Il est, en sa qualité de « clerc », réclamé par l'évêque de Paris.
Mais, cette réclamation n’ayant pas été suivie, il est déféré au tribunal civil qui le condamne à mort.
Il en appelle au Parlement.
Sa famille et ses amis sollicitent pour lui une lettre de rémission. Ils mettent en avant la grossesse de sa jeune sœur qui pourrait mourir de ce déshonneur, ainsi que son enfant. Ils vont même jusqu’à s’engager à le surveiller pour l’empêcher de reprendre une vie de débauche, due essentiellement à sa jeunesse et à sa pauvreté.
Emu, le roi le gracie en septembre 1457, en mémoire de la fidélité de son père pendant l’adversité. Dans la lettre de rémission, il souligne que « la plupart (de ses amis) sont gens d’Etat et nos officiers ».

Une année fatale

Les conditions de la rémission sont les suivantes : encore une année en prison « au pain et à l’eau » suivie d’un départ à « Saint Jaques en Galice et en rapporte certification du maître de l’église de Saint-Jaques ».
Cette année lui fut fatale car le Parlement déclara la rémission entachée de nullité après la découverte de l'omission par sa famille de certains cas graves.
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Le gibet de Montfaucon peint ici par Jean Fouquet au XVe siècle était situé sur la butte du même nom, rue actuelle de la Grange-aux-belles. Un peu plus tard Villon, dans la ballade n°2 de son Jargon et Jobelin écrite en argot raconte la triste fin de Regnier et conseille à ses amis :

 
« Coquillards changez souvent d’habits, et tirez tout droit au Temple.
Evitez, partant d’ici, que le vent votre cape n’enfle (comme il le fait aux pendus).
Montigny fut soufflé en haut (pendu à Montfaucon, près du Temple)
Le nœud (de la corde) lui provoqua l’angine
Bien qu’il y cria « au secours » au tremolo (3 fois)
Le bourreau lui rompit le cou ».
 
Plusieurs coquillards furent arrêtés vers 1455 et « questionnés » pour livrer des noms.
L’un des plus bavards, Perreret le Fournier, barbier, en désigna une soixantaine, dont Regnier de Montigny. En marge de son nom, le procureur a ajouté « mort et pendu ».

Honte de sa noble famille, Regnier de Montigny était bel et bien un individu dangereux. Il pouvait récidiver. C’est un risque que n’a pas pris la justice. Preuve que l’on n'envoie en pèlerinage pénitentiel que des meurtriers par accident qui ne mettent pas la Société en danger.
 
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Demain, le mot « coquillard »