Pau, un jeudi d’octobre 1943
Geneviève Pouillot, « boîte aux lettres » dans la Résistance, accepte de transmettre un message à un résistant amputé du bras gauche.
Elle raconte :
Elle raconte :
« La rencontre aurait lieu devant les fonts baptismaux de l'église Saint-Jacques qui, à l'époque, se trouvaient sur la droite de l'entrée principale. Signe de reconnaissance, un journal sortirait de la poche d'un vêtement. Pour ma part, j'étais blonde, une mantille noire sur la tête et un état de grossesse avancé. Saint Jacques était ma paroisse […]
Le rendez-vous était pour le jeudi à 11h. Le jour prévu, j'entrai à l'église alors que retentissaient les 11 coups de l'horloge. Je m'assis près des fonts baptismaux, la tête dans les mains, l'oeil aux aguets derrière mes doigts écartés. J'aperçus bientôt un homme cravaté, de noir vêtu, qui descendait lentement la contre-allée. Tandis qu'il se rapprochait, je remarquai que sa manche gauche aboutissait dans la poche de son veston d'où émergeait un journal. Indiscutablement c'était mon « invité ».
Lorsqu'il arriva à mon niveau, j'allais me redresser pour lui faire signe lorsque, à travers mon poste d'observation, je me sentis dévisagée par un tel regard d'acier et de haine, celui d'un oiseau de proie que, clouée littéralement sur place, je n’esquissai aucun mouvement. Je m’absorbai encore plus dans mon recueillement. Il fit demi-tour, remonta vers l'autel, puis revint à pas lents, toujours par l'allée latérale, dans un va-et-vient obstiné. Comment échapper à ce traquenard ? Ce prédateur avait manifestement tout son temps. Je commençais à avoir peur… très peur.
Une femme enceinte entre les mains de la Gestapo ? Mon Dieu aidez-moi ! »
Et l'imprévisible se produisit.
« Le bedeau descendit la nef à vive allure, ouvrit la grande porte de l'église et l’orgue retentit. Des croque-morts entrèrent, marchant à une cadence rapide, sans doute un autre convoi suivrait dès la fin de la cérémonie. Mon invité se trouvait alors à bonne distance de moi. J'en profitai pour quitter ma chaise et me noyer dans le défilé éploré qui remontait jusqu'au grand autel par l'allée centrale. Je gardais prudemment ma gauche, cachée par une femme grande et forte, vrai paravent qui me masquait. Arrivée à la hauteur du catafalque j'obliquai brusquement à gauche, abandonnant cette famille qui me sauva la vie. Je connaissais parfaitement toutes les issues de ma paroisse. Je choisis de m'évader par la porte latérale gauche et, malgré mon état, courus tout le long de la petite rue qui borde l'église ».
Elle court jusque chez elle où elle demande à sa jeune bonne de n’ouvrir à quiconque et de placer un mouchoir à la fenêtre, signe convenu avec son mari lui interdisant de monter. Le lendemain, elle reçut un courrier lui confirmant que le résistant n'était pas venu. Elle n’a jamais eu de réponse, mais il lui parut probable que la Gestapo avait intercepté le vrai résistant…
Elle s’est barricadée chez elle pendant une semaine et a interrompu ses activités jusqu’à la naissance de son bébé, pour les reprendre dès la maternité…
Sauvée par miracle ?
Certes ! Geneviève Pouillot a dû sa survie à l'arrivée « providentielle » du convoi funéraire, à sa méfiance et sa présence d'esprit. Dans sa peur, elle a appelé Dieu à l'aide.
Mais elle n'a pas parlé de miracle.
Mais elle n'a pas parlé de miracle.
Un miracle de Saint Jacques ?
Que faut-il pour signer un miracle ? Souvent, c’est un témoin qui le reconnaît comme tel.
Ici, le témoin est Olivier Cazabat, jeune historien membre de notre association. Cette question lui est venue spontanément en lisant le livre de souvenirs de Geneviève Pouillot, Souvenirs d’une boîte aux lettres de la Résistance[1].
Ici, le témoin est Olivier Cazabat, jeune historien membre de notre association. Cette question lui est venue spontanément en lisant le livre de souvenirs de Geneviève Pouillot, Souvenirs d’une boîte aux lettres de la Résistance[1].
L’historien aussi sait rêver, surtout s’il est lui-même pèlerin. Le double registre, matériel (l’église Saint-Jacques, le convoi mortuaire) et immatériel (l’attention et l’intuition de Geneviève) a suffi à son imagination pour proposer : c’est un miracle de saint Jacques.
Aucun pèlerin au long cours qui a pu, sur ses chemins, être témoin de situations périlleuses ou de gros ennuis dont l’heureuse issue est spontanément attribuée sans hésiter à Saint Jacques ne désavouera cette affirmation.
[1] Ed. François-Xavier de Guibert, Paris, 1995.
L'église Saint-Jacques de Pau
Le patronage de saint Jacques remonte au XVIIe siècle. Elle a été reconstruite entre 1861 et 1868 et dotée de deux belles verrières consacrées à la légende de saint Jacques. Ce sont les verrières hautes du chœur, de part et d’autre de la verrière centrale représentant le Christ en croix. Elles sont difficiles à examiner car l'oeil est attiré par les verrières basses.
Les descriptions détaillées qui suivent sont dues à Bertrand Saint-Macary, président de l’association Saint-Jacques des Pyrénées-Atlantiques.
Chaque verrière se lit de haut en bas et de gauche à droite
Les descriptions détaillées qui suivent sont dues à Bertrand Saint-Macary, président de l’association Saint-Jacques des Pyrénées-Atlantiques.
Chaque verrière se lit de haut en bas et de gauche à droite
Verrière gauche : scènes de la vie de saint Jacques
La vocation de saint Jacques
Dispersion des apôtres, saint Jacques va à Jérusalem
L'arrestation de saint Jacques
Saint Jacques avec Josias
Verrière droite : La Translation des reliques et Clavijo
Le corps de saint Jacques embarqué
Les reliques de saint Jacques transférées à Compostelle par Alphonse roi de León
Le songe du roi Ramire
Saint Jacques à la bataille de Clavijo