Xaintonge, une revue à contre-courant sur Talmont et Compostelle
« pourquoi aller si loin, se plaisent à dire nos anciens, quand on a si près de chez soi des saints qui remplissent si bien leurs fonctions ? »
« ce saint Jacques de Compostelle qui a tant agité nos professionnels du tourisme en 1999 puisque nous fêtions la dernière année jacquaire du siècle, tout en évoquant les nombreux pèlerinages saintongeais »
Au fil des pages la rédaction s’étonnait du silence de la mémoire collective à propos de ce grand pèlerinage alors que tant de pèlerinages locaux bien antérieurs sont encore connus :
« Tous les ouvrages sur Compostelle sont d’accord, les jacquets longeaient l’actuelle N137. Les anciens s’étonnent que leurs anciens ne leur en aient jamais parlé… A Préguilhac, la rue Saint-Jacques est née en 1997… La Jard n’a pas reçu de borne compostellane et pourtant elle est la seule de la région à porter le vocable Saint-Jacques, etc, etc.»
« Compostelle, un pèlerinage confidentiel ? » ;
« Cette lanterne qui attire le pèlerin » ;
« L’invention moderne de Compostelle » ;
« Saint Jacques, sauveur du patrimoine ».
Des justifications irrecevables
Un article méritait que nous nous y arrêtions, qui allait au-delà de la simple enquête de voisinage puisqu’il présentait l’interview d’un érudit historien, Jacques Tribondeau.
Il mérite d’être reproduit, avec l’accord des auteurs.
L’interview de Jacques Tribondeau
Au XIXe siècle, aucun érudit n'associe Talmont à Compostelle.Dans les Mémoires de l'ingénieur militaire Claude Masse, (1706-1709), si on lit que « les bénédictins de Saint-Jean d'Angély maintiennent à Talmont un vicaire perpétuel pour une église si pauvrement ornée », il n'y pas un mot sur les fastes du pèlerinage compostellan.
En 1839, un certain Gautier, qui travaille au.service statistique de la Charente-Inférieure, ne fait pas davantage allusion à un pèlerinage.
En février 1868, dans le bulletin du diocèse qui relate l'histoire de la paroisse et de l'église, pas une ligne sur saint Jacques.
Au début du XXe siècle, de nouveaux mots sur Talmont apparaissent : « abbaye romano-byzantine », « mort de Talmont, victime de l'abandon et du péril des flots ».
Des descriptions sont reprises dans les mêmes termes en 1926 dans le roman Monique, poupée française* dont l'action se situe à Talmont. Mais pas une ligne sur le pèlerinage. Comme le dit notre interlocuteur, « avec Compostelle, il y aurait eu pourtant de beaux développements à faire ».
En 1936, le maire, qui publie des opuscules pour promouvoir sa commune, ne parle pas davantage d'embarquement de jacquets. En 1941, quand on fonda la société des Amis de Talmont, toujours rien sur la Galice, et encore rien dans les écrits de Firmin Seguin, dernier abbé résident, et Dieu sait combien il s'est démené pour attirer des pèlerins pour sauver son église en triste état ».
« Charles Dangibeau (1852-1935), le plus sérieux des érudits qui a relevé tous les documents, chartes, actes divers relatifs à Talmont, n'a jamais fait mention de pèlerinage compostellan, même à propos du port ... ».
Le mythe de Talmont sur les chemins de Compostelle est né en 1938
En 1934 disait-il, Jeanne Digard* ouvrait la voie en situant Talmont sur la grande route de Blaye, sans donner aucune référence :
En 1938, après la traduction française du Guide du Pèlerin, le chanoine Tonnelier, bien connu pour ses approximations historiques, amplifiait :
« Le bourg se peupla vite, les bénédictins firent sa fortune, étant grands organisateurs du mouvement qui entraînait les foules vers Saint-Jacques-de-Compostelle. Ils s'ingéniaient à créer des centres d'accueil, Talmont en était un. Là, les pèlerins retrouvaient ceux venus par la route de La Rochelle et de Saujon »…
Pour lui, la messe est dite, Talmont est devenu
« plaque tournante et point de bifurcation important des routes terrestres et maritimes vers Compostelle ».
L’officialisation du mythe
Et la rédaction concluait :
« en Charente, les tracés n’ont aucune valeur historique. Il suivent des voies attirantes par la beauté de leurs sites ou de leurs monuments. Ils font découvrir des communes oubliées du tourisme, parfois au grand étonnement de leurs habitants.
Au fond le pèlerinage à Compostelle est une notion évolutive. Saint Jacques était très bon saint qui a su et saura s’adapter à toute configuration le concernant ».
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