Le voyage d'un érudit
Carte du voyage de Jérômr Münzer
Voyager à travers la moitié de l’Europe n’est pas un privilège du tourisme moderne. Vers la fin du Moyen Age, il fallait évidemment y consacrer un à deux ans, mais des bourgeois aisés comme ceux d’Augsburg ou Nuremberg pouvaient se le permettre. Ce récit vieux de cinq cents ans décrit le déroulement d’un tel voyage et le lecteur contemporain peut sûrement encore s’intéresser au voyage, s’étonner, s’instruire et y participer.
Qui était Jérôme Münzer ?
Il est né en 1437 à Feldkirch dans le Vorarlberg. Après des études des arts libéraux à Leipzig, il obtint le titre de docteur en médecine à Pavie et s’installa à Nuremberg. (Les arts libéraux se divisent en deux degrés : le Trivium qui comprend la grammaire, la dialectique et la réthorique et le Quadrivium qui comprend l’arithmétique, la musique, la géométrie et l’astronomie).
En 1494, alors que la peste y sévissait, Münzer chercha le salut dans la fuite. Il laissa femme et enfant dans la ville impériale et entreprit un long voyage d’environ 7000 km qui le conduisit entre août 1494 et le 15 avril 1495 de Nuremberg par la Suisse et la France en Espagne et au Portugal et finalement dans les Flandres.
Nuremberg était, aux environs de 1500, un des plus grands centres intellectuels de l’humanisme. Dans les cercles scientifiques locaux, le médecin de Feldkirch prit part à diverses entreprises, comme par exemple le globe de Martin, terminé en 1492, et à une des plus grandes entreprises de son temps, la chronique mondiale d’Hartmann Schedel imprimée un an plus tard en allemand qui, à elle seule, comprend 597 pages et 1804 gravures sur bois.
Les motifs du voyage de Münzer étaient multiples. Münzer s’intéresse à tout et le décrit dans l’esprit de curiosité critique de son temps en faisant souvent des comparaisons avec des éléments qu’il connaît de sa ville de Nuremberg. Il était vraisemblablement aussi chargé d’une mission diplomatique de l’empereur Maximilien. Au cours de son voyage il rencontra le roi Ferdinand d’Espagne à Madrid et s’entretint avec le roi du Portugal Jean II à Evora. De fin novembre à début décembre 1494 il passa six jours à Lisbonne où on l’informa sur les combats des Portugais en Afrique du Nord et lui fit rapport sur les voyages de découvertes.
Münzer rejoint ses contemporains et leurs récits de voyages dans leurs critiques des reliques comme celles de Saint-Sernin de Toulouse ou de la cathédrale de Santiago. Il nous a aussi rapporté une copie d’une partie du Liber Sancti Jacobi, en particulier du Pseudo-Turpin qu’il fit à Compostelle grâce vraisemblablement à un chanoine nommé Jean Ramus. Le schéma de l’église de Santiago qui figure dans cette copie passe pour être la plus ancienne représentation d’une église dessinée par une main privée dans le monde médiéval latin. Cette copie serait aussi l’explication d’un séjour de neuf jours à Compostelle, l’un des plus longs.
Il n’en reste pas moins que le sanctuaire de Santiago qui ne pouvait être évité dans ce voyage n’en était en aucun cas le but.
Il n’en reste pas moins que le sanctuaire de Santiago qui ne pouvait être évité dans ce voyage n’en était en aucun cas le but.
Robert Plötz
Président de la Société Saint-Jacques en Allemagne
Président de la Société Saint-Jacques en Allemagne
Plan de la cathédrale de Compostelle rapporté par Jérôme Münzer
couverture du récit de voyage de Jérôme Münzer