C’est là, à Anvers, que naît en 1591 Gérard Seghers. C’est là qu’il meurt en 1651, après une vie consacrée à la production d’œuvres picturales.
Il étudie dès l’âge de 12 ans le dessin et la peinture et devient maître en 1608, alors qu’il n’a que 17 ans, dans le cadre de la Guilde de Saint-Luc d’Anvers, organisation corporative strictement réglementée qui regroupe des peintres, des graveurs, des sculpteurs et des imprimeurs. Il en devient doyen en 1646.
Après un séjour en Italie, à Rome et à Naples, pendant lequel il s’imprègne de caravagisme, et un passage en Espagne, il est de retour en 1620 à Anvers où il anime son atelier en même temps qu’il fait commerce des œuvres d’art.
Il côtoie, entre autres artistes de renom, les grands peintres anversois Pierre Paul Rubens (1577-1640) et Antoine van Dyck (1599-1641), comme nous le rapporte Anne Delvingt1.
1 - Delvingt Anne : Gérard Seghers, un peintre flamand entre Maniérisme et Caravagisme. Musée des Beaux-Arts de Valenciennes, 2011.
Du premier, dont il a peut-être fréquenté l’atelier, il s’est inspiré pour la composition de son sujet : personnage en buste, de trois quarts, tenant un bourdon de la main gauche, et empoignant de manière inhabituelle un livre de la main droite. C’est ainsi qu’apparaît le saint Jacques apôtre peint par Rubens vers 1612/1613, actuellement conservé au Musée du Prado, à Madrid.
Du second il adopte l’opportunité d’insérer dans ses compositions des portraits de ses collègues et amis, artistes anversois. Et là il semble s’agir d’un visage qui ne serait autre que celui de Pierre Paul Rubens, comme on le trouve dans un autoportrait daté de 1623, aujourd’hui dans la "Royal Collection", au Royaume-Uni.
Enfin, une remarque personnelle pour compléter les sources possibles d’inspiration de notre imagier, Gérard Seghers, peut-on penser qu’il ait eu entre les mains les gravures de Hendrik Goltzius (1558-1617), le Credo des apôtres (1588-1589) ?
Le chapeau de saint Jacques, dans sa forme et dans la décoration de son large rebord par une alternance de coquilles et de bourdonnets croisés y est quasiment identique.
Ainsi donc, sorti de l’ombre, le portrait de saint Jacques, de Flumet, même si l’on ignore son auteur, et les conditions de son arrivée jusque dans cette église Saint-Théodule, montre tout son intérêt au travers des informations qu’il recèle à partir de son modèle flamand !
D’ailleurs celui-ci a fourni matière à d’autres imagiers, copistes graveurs comme (Paulus ?) Vinck à Anvers au XVIIème siècle ...
D’ailleurs celui-ci a fourni matière à d’autres imagiers, copistes graveurs comme (Paulus ?) Vinck à Anvers au XVIIème siècle ...
...ou bien encore, dans une facture très rustique, au peintre resté anonyme, probablement du début du XIXème siècle, qui réalisa une représentation de saint Jacques dans une série de portraits des apôtres pour la chapelle Saint-Antoine de Névache dans les Hautes-Alpes.
Dans la chapelle Saint-Antoine de Névache (Hautes-Alpes)
Plus récemment, entre 2006 et 2007, sous le titre « Gloriae, le Miniature dei Santi », la maison d’édition italienne « Pubblicazioni » de Lugo, en Romagne, a publié une série de 10 livres-coffrets pour recueillir 600 vignettes présentant les saints avec une brève notice historique et la mention de leurs attributs. Saint Jacques le Majeur figure sous les traits que lui avait donnés Gérard Seghers au début du XVIIème siècle.
La liste des réalisations inspirées du travail initial de Gérard Seghers est sûrement bien loin d’être close. À nous tous de la compléter !
Février 2023
Jean-Luc Penna
Commission histoire et patrimoine de l’Association Rhône-Alpes des Amis de Saint-Jacques