Sous le signe de saint Jacques
Le village entourant cette chapelle médiévale, devenue paroisse seulement en 1808), est situé dans les volcans d’Auvergne, à plus de 800 m. d’altitude, au pied du Griou et du Plomb du Cantal. Il est traversé par la Cère qui prend sa source au-dessus du village et par de multiples ruisseaux descendant des montagnes. Son nom viendrait de la déesse Cérès, déesse des moissons (les Blats seraient les blés) qui aurait donné son nom à la Cère.
Or, l’Epître de Jacques (qui lui était attribuée au Moyen Age) a fait de saint Jacques le protecteur des « biens de la terre ». Il protège aussi montagnes, sommets et cols des démons qui les hantent, tout comme ils hantent les rivières et les ponts ou les gués.
Comment s'étonner que la dévotion médiévale l'ait choisi comme patron de ce village bien avant que Compostelle n'y soit connue ?
Les pèlerinages de l’abbé Jammet
L’année suivante, il organise un second pèlerinage, seul cette fois, selon le même principe, avec d'autres jeunes filles de sa paroisse.
Il est possible qu’elles aient fait partie de la JAC (Jeunesse Agricole Catholique). Vincent Flauraud (aujourd’hui maître de conférences en histoire moderne à l’université de Clermont-Ferrand) qui m’a fait connaître le pèlerinage de 1958 l’avait supposé dans sa thèse de doctorat. L’abbé Jammet que j’ai rencontré en 2004 à propos du pèlerinage de 1959 me l’avait laissé entendre en expliquant que sa date tardive correspondait à la fin des travaux agricoles libérant les jeunes filles.
Les informations sur ces pèlerinages sont partielles, elles proviennent d’articles de la Voix du Cantal, journal de la presse catholique diocésaine.
Le pèlerinage de 1958
Ils se sont aussi bien amusés, le chef de popote s’étant fait le spécialiste de « virages de tentes ». Et les demoiselles n’ont pas cherché à imiter la vie quotidienne des pèlerins médiévaux tant elles ont apprécié de n’avoir pas à « hanter les auberges espagnoles à relents d’huile d’olive et de poisson frit ».
Du moins le visiteur a-t-il encore le loisir de rêver dans ces ruelles aux impressionnants dallages et devant cette incomparable cathédrale de style oriental qui semble l’œuvre d’un enchanteur de conte des mille et une nuits et non le fruit de la Foi médiévale ».
Vincent Flauraud a noté l’importance accordée à ce voyage puisque, avant de rentrer dans leurs villages, les pèlerins ont éprouvé le besoin d’exécuter un « triomphal tour de Square » à Aurillac.
Le pèlerinage de 1959
Son annonce par la même Voix du Cantal fut sobre mais ambitieuse. Un entrefilet du 27 juin 1958 annonce, du 28 septembre au 10 octobre,
« un vrai pèlerinage, comme autrefois …M. l’abbé Jammet a l’intention de faire revivre les pèlerinages d’autrefois vers Saint-Jacques de Compostelle ».
Au retour le pèlerinage est présenté sur une note plus touristique que dévote. La Voix du Cantal du 31 octobre :
« Ces jeunes filles ont admiré tour à tour de magnifiques cathédrales (celle de Saint-Jacques de Compostelle et de Saint-Isidore-de-Leòn en particulier), des villages et des ports pittoresques » (Malheureux journaliste qui a confondu, à Leòn, la collégiale Saint-Isidore et la cathédrale !).
« L’océan, calme ou en furie, la différence de végétation (oliviers ou vignes à perte de vue). Les mœurs des habitants les ont vivement frappées, notamment la fière allure des femmes déambulant avec grâce et légèreté, un panier sur la tête ».
L’abbé Jammet et l’archevêque de Compostelle
Curieusement, la Voix du Cantal est muette sur le séjour à Compostelle. Et pourtant ce fut un grand moment que celui où l’abbé Jammet fut reçu par monseigneur Quiroga y Palacios, archevêque. Il est probable qu’il a abandonné son groupe pendant cette visite. Il en a gardé un souvenir ému.
Nous verrons dans la prochaine lettre comment il a su faire profiter sa paroisse de sa visite à Monseigneur au cours d’une journée mémorable, le 14 août 1962.
A propos des illustrations
J’ai eu envie de croiser le regard de ces jeunes sur la ville de Compostelle avec celui d’un autre jeune, André Petit, brillant ingénieur parisien qui a laissé, lui, des photos de sa visite touristique dans cette même ville, exactement à la même époque.
Le regard du touriste est attiré par les mêmes images. Les photos ne disent pas autre chose : les femmes portant leurs fardeaux sur la tête côtoient les luxueuses voitures devant le Parador, les chars à bœufs circulent tranquillement dans les rues
Remerciements à Vincent Flauraud et aussi à l’archiviste du diocèse de Saint-Flour qui m’a communiqué ces deux articles et trois photos des jeunes filles, non datées. Merci aussi à Jacques Petit et Miguel Tain, le premier pour avoir trié et numérisé les photos de son père, le second pour avoir identifié les lieux.
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La Grande chanson des pèlerins d'Aurillac
Pour en savoir plus sur la grande chanson, voir plusieurs articles de la revue électronique SaintJacquesInfo, y compris une présentation détaillée de ses cinq versions dont une seule mentionne Compostelle.