Echos de la XVe session des leçons d’été de l’USC


Rédigé par le 22 Juillet 2024 modifié le 27 Juillet 2024
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Cet article n’est pas un compte-rendu exhaustif. Il donne une impression générale et commente brièvement les communications. Chaque « écho » porte le titre d'une communication ou en présente plusieurs sous un titre général de notre choix.



Impression d’ensemble

Le propre de ces journées qui s’inscrivent dans le cadre de l’enseignement  de l’USC est de mêler des interventions de chercheurs confirmés ou de responsables en activité à celles de doctorants qui y trouvent une possibilité de s’affirmer et de consolider leurs travaux par les discussions qu’ils ouvrent.
Ce programme, globalement intéressant, justifiait le déplacement. Son contenu nous a donné l’impression d’abandonner un peu la recherche historique au profit d’études à caractère socio-économique ou limitées à l’époque moderne. Cette tendance répond sans doute aux besoins immédiats de la ville de Santiago et de la Galice. Une réduction du nombre d'étudiants intéressés par l'histoire pourrait aussi être une explication.

Pèlerins, touristes et tourispèlerins

Cette vue d'artiste montre ce haut-lieu, sanctuaire où les pèlerins viennent prier et monument où les touristes se cultiver ou se distraire. Ces deux catégories de visiteurs ont longtemps suffit aux autorités civiles et religieuses et aux organismes bénévoles pour organiser l'accueil et le séjour de ces étrangers, sans gêner la population locale et à la satisfaction du commerce local. Des investissements ont été consentis, des aménagements réalisés et des mesures d'ordre ont été prises.
Le nombre croissant de pèlerins faisant croître l'intérêt de Compostelle comme but touristique, des préoccupations nouvelles se font jour et nécessitent de nouvelles décisions.
Trois communications ont abordé ce sujet sous des aspects divers, analyse de l'évolution des nombres de visiteurs et de leurs besoins spirituels et matériels, nécessité de coopérations entre les organismes concernés :
* Communautés locales et chemins de Saint-Jacques. Alliances et menaces.
* Analyse de l'offre commerciale et demande des touristes
et pèlerins à Compostelle comme fin du Chemin.

* Les tourispèlerins : les motivations du pèlerin du XXIe siècle.

Pendant longtemps Compostelle a pu se contenter de distinguer deux catégories de visiteurs : les pèlerins avec un sac à dos (mochila) et les touristes avec des valises (maletas). Mais la réalité est devenue moins simple. Comment distinguer le pieux pèlerin du touriste fêtard qui ont sympathisé sur le chemin et arrivent ensemble à pied ? Et parmi les touristes descendant de l'autocar d'un tour operator lequel est venu uniquement par dévotion pour saint Jacques? A Compostelle le mot " touripèlerin " a été inventé pour ceux qui ont des valises. Mais le développement des services de bagagerie le long des chemins a compliqué les choses. De plus en plus de pèlerins portent un petit sac, un voyagiste transportant  leur valise ou un gros sac traditionnel.
Et comme l'a dit un intervenant, à propos de la présence du corps de saint Jacques

" comment vérifier scientifiquement une affaire de foi ? "

Mais la foi n'est pas seule en cause quand il s'agit d'accueillir, fournir des services, faire du commerce,  gérer les circuits de visite de centaines de milliers d'étrangers à la ville sans perturber trop la vie des habitants.
Au service d'un pôle spirituel dont l'impact sur ceux qui font 
l'abrazo au saint n'est pas mesurable, le pèlerinage a une influence structurante non négligeable sur la ville et la Galice.
 

L'image ci-dessus, copie de la photo d'une diapositive présentée au cours d'une communication donne un exemple d'analyse des motivations de divers publics visitant Compostelle

Le Chemin de Saint-Jacques en Pologne

 Cette communication a donné un tableau surprenant de l’implantation de chemins de Saint-Jacques dans ce pays qui se souvient de l’impact du pèlerinage du pape Jean-Paul II en 1982. L’Eglise polonaise a visiblement profité du dynamisme de la génération qui a participé aux JMJ de 1989. La Pologne possède un réseau de 7500 km de chemins répartis en 40 itinéraires dont 4 principaux, la communication a donné une impression de surabondance tout en soulignant l’aspect structurant du pèlerinage galicien pour la Pologne. La moitié des édifices religieux polonais ont une « relation » avec le premier apôtre martyr
 

La tradition jacquaire et le chemin

Nous avons réunis dans ce paragraphe deux communications aux titres prometteurs mais l'une et l'autre décevantes
* Analyse de l'impact du Xacobeo dans le processus de « re-sémantisation » du Chemin de Saint-Jacques et de la figure du pèlerin : cas de la presse écrite nationale espagnole (1992-2022).
Le titre de cette communication, déjà long, était incomplet car l’exposé comprenait aussi la presse française. Celle-ci fut escamotée, avec un nombre de références ridiculement insuffisant. La longueur du titre cache néanmoins une approche qui se révélera sans doute intéressante lorsque le travail sera terminé et synthétisé
* Au-delà du Codex Calixtinus. Les autres textes de la tradition jacquaire.
Cette communication aurait pu être intéressante si elle s’était inscrite dans la continuation des travaux de Bernard Gicquel précédant sa traduction en français du Codex Calixtinus parue en 2003. Il est également dommage que l’expression « Au-delà du Codex Calixtinus » n’ait pas été précisée par des commentaires sur les relations de ces textes avec le Codex.

Approches historiques

* Réinventer la tradition : esthétiques et politiques 
du pèlerinage moderne à Saint-Jacques-de-Compostelle (1879-1950).
Le mot " esthétiques ", peu commenté en tant que tel, recouvrait en réalité la présentation de documents iconographiques dont certains inédits ou fort peu connus. De nombreuses images ont accompagné ce survol passionnant de 70 années de pèlerinage.
* Les paradoxes de la recherche jacquaire. 
Les Années Saintes Compostellanes à l'Époque Moderne : un sujet (presque) inconnu.
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Cette communication a innové en cheminant dans l'histoire du pèlerinage, vue au travers du prisme d'un survol des années saintes, des plus brillantes, comme celle de 1434, célèbre par le Pas d'Armes du pont d'Orbigo, aux plus sombres. Les diverses causes de la crise du XVIe siècle, dont les origines furent à la fois religieuses, politiques et sociales ont été analysées avec clarté. A ce propos, on dit souvent que les rois de France ont interdit les pèlerinages. En fait une seule ordonnance de 1717, les a interdits complètement. Elle fut levée en 1738, les pèlerinages redevenant, comme auparavant, soumis à autorisations. Le déclin de Compostelle se poursuivit jusqu'à la découverte d'ossements sous le sol de la cathédrale que l'archêque fit analyser. Cette conclusion fut soumise au pape. La Lettre apostolique Deus Omnipotens du pape Léon XIII valida cette conclusion, offrant à la ville une année jubilaire supplémentaire. Mais nous n'avons pas compris où se situe le paradoxe.

Patrimoine jacquaire

XVe Lecciones de l'USC
Pistoia et Saint-Jacques-de-Compostelle : relation et culte à l'Apôtre.
L'auteure de cette communication a publié la lettre Pèleriner informé n°177,
https://www.institut-irj.fr/Lettre-177-Une-tradition-jacquaire-a-Pistoia_a722.html
 * « Paso a paso », vingt-trois chroniques sur le Chemin de Saint-Jacques enregistrées en 1993
La présentation de ce film a permis aux assistants connaissant bien la Galice de constater que plusieurs éléments de patrimoine jacquaire présents dans les églises en 1993 avaient disparu aujourd’hui. Cette triste observation renforce la conviction de l’IRJ de la nécessité de la création d’une base de données du patrimoine jacquaire.

Quinze ans de Leçons Jacquaires.

Les journées ont été conclues par une rétrospective des 14 premières Lecciones présentée par leurs deux directeurs et un coup d’œil sur les éditions futures montrant l’importance du travail accompli dans une coopération étroite entre la recherche universitaire, les administrations et l’Eglise. 

Dans les perspectives, cette session a donné lieu à la présentation de deux bases de données. L’importance que l’IRJ attache à la création d’une base de données du patrimoine jacquaire conduit à consacrer un article à cette question.