Une tradition de liens intellectuels
Il n’en était pas de même dans les milieux intellectuels de Madrid où des intellectuels français étaient présents depuis la fin du XIXe siècle : en 1884 était créé le « Collège de la Société française de bienfaisance », en 1909, l’Université de Bordeaux fondait une « École des hautes études hispaniques », destinée à accueillir de jeunes chercheurs français, en 1919, le Lycée français continuait le Collège cité et en 1920 la Casa Velasquez (photo ci-dessous) continuait l’Ecole de Bordeaux.
En 1931, l’avènement de la République a constitué un événement qui a poussé les intellectuels français de gauche à entrer davantage en contact avec leurs homologues espagnols. En 1934, un Comité France-Espagne fut ainsi fondé sous le haut patronage de M. Edouard Herriot et de M. l’ambassadeur d’Espagne (plusieurs réunions préparatoires avaient eu lieu chez Pablo Picasso qui, dès cette époque, résidait en France). La composition du bureau prouve à quel point les membres, parfois même d’origine espagnole, étaient des passionnés de la culture de ce pays .
Président Mario Roustan ancien ministre de l’Instruction publique. Parmi les vice-présidents, Léon Blum et d’autres futurs créateurs du Front populaire ainsi que Jean Babelon, futur président-fondateur de la Société française des amis de Saint-Jacques (en 1950)
L’article 2 des statuts définit clairement le but :
« développement des relations intellectuelles, artistiques et économiques entre la France et la République espagnole ainsi que l’étude, dans un esprit de concorde et d’amitié, de toutes les questions pouvant intéresser réciproquement les deux nations »
L'aura de Compostelle
L’une des premières actions de ce comité est l’organisation, par M. le général Andlauer d’un
« voyage à Saint-Jacques-de-Compostelle pour les vacances ».
Le Comité demande une subvention à l’ambassadeur de France en Espagne pour pouvoir « joindre au groupe de professeurs et d’étudiants une délégation désignée par l’Union des Provinces françaises à Paris ». De fait, vingt jeunes filles des provinces les accompagnent. Il s’agit d’effectuer ce voyage « le long de la route de Saint-Jacques-de-Compostelle »
Hendaye, Saint-Jean-Pied-de-Port, Roncevaux, Pampelune, Burgos, Léon, Orense, Vigo, La Galice, Saint-Jacques puis retour par La Corogne, les Asturies, Santander, Bilbao, Saint-Sébastien, Hendaye
Parmi les coupures de journaux jointes, un petit article la Vox de Galicia du 9 août 1934 relatant leur passage à Compostelle
« Pèlerins et touristes de France »
« Une trentaine de pèlerins et touristes français venus de Vigo, la plupart d'anciens ministres et professeurs et certains d'entre eux des Hispanistes enthousiastes ont été très intéressés par la visite de Compostelle. Ils venaient retrouver une partie du camino francés française, l’ancienne route des pèlerins. Ils ont longuement visité la cathédrale. Ils ont ensuite visité les autres monuments. L'interprète municipal des langues don Santiago Mini leur a servi de ciceron. Ils sont descendus à l'hôtel Compostela (photo ci-dessous). De là, ils continueront leur voyage à La Corogne ».
Un seul souvenir, celui du Consul deFrance
Le 16 août 1934, le consulat de France de la Corogne envoie un rapport au ministre des Affaires étrangères sous le titre
« Excursion d’intellectuels français en Galice »
« Excursion présidée par le sénateur ex-ministre Mario Roustan et Jean Camp, agrégé d’université, composée d’une quarantaine d’excursionnistes distingués[…] Les municipalités se sont fait partout un plaisir de réserver aux visiteurs un accueil des plus chaleureux[…] Ils venaient en dernier lieu de Santiago de Compostelle après avoir parcouru les principales villes de la Galice »
Il n’existe rien d’autre dans les archives du ministère des Affaires étrangères sur les activités de ce Comité. Un second comité France-Espagne fut ensuite constitué, pendant la guerre civile.