Textes de vécu de compagnons
En 1950, Roger Lecotté, fondateur du musée du compagnonnage de Tours, appelait l'attention, pour la première fois, sur une serrure conservée au musée d'Avignon. Serrure dite du XVIe, datée aujourd’hui du XVIIe.
Il remarquait des
Une première fois bien tardive. D’où lui était venue cette idée ?« éléments qui pourraient être compagnonniques […] un pèlerin (peut-être St. Jacques, patron des pèlerins, des « passants » et du Compagnonnage) avec bourdon en dextre, chapeau orné de coquilles et gourde en bandoulière ».
Roger Lecotté a peut-être été inluencé par une lithographie de Perdiguier dont il sera question demain. En outre, son aura dans le monde des compagnons lui a permis d'énoncer une vérité première malgré le manque de preuves.
Pourtant, Agricol Perdiguier, le compagnon auteur du Livre du compagnonnage en 1839, ne fait aucune allusion à saint Jacques.
Adopter saint Jacques le Majeur comme inspirateur du Devoir pourrait être justifié par la fameuse phrase de son Epître (étape 39) « sans œuvres la Foi est morte ». Et par le fait que, comme les pèlerins, il protège les voyageurs. Ne porte-t-il pas, comme eux, la canne (le bourdon) et la gourde ?
Cette hypothèse fut reprise, copiée, déformée, amplifiée, contestée jusqu’à mélanger pèlerins de Compostelle et Compagnons avec les Celtes, les Templiers, les alchimistes (étape 39), etc.
Textes romancés
En 1957, le Compagnon Raoul Vergez, dans La Pendule à Salomon voit dans le chrisme, présent sur la façade des églises pyrénéennes LE « signe du chemin de Compostelle ». Mais c’est un roman. Il est suivi par Louis Charpentier qui, lui, n’est pas plus compagnon que Templier mais vit des mystères du monde. Dans Les Jacques et le mystère de Compostelle, en 1971 il établit un lien catégorique entre les bâtisseurs de cathédrales, les Compagnons du rite de Maître Jacques et le voyage à Compostelle
Un avis autorisé
Pour ces articles, en particulier ce paragraphe, j'ai travaillé avec une sommité en la matière, Laurent Bastard, ami de Lecotté puis conservateur du musée du compagnonnage de Tours. Il a bien voulu m'aider à mettre à jour et résumer un article qu'il avait confié à la Fondation David Parou Saint-Jacques en 2006.
Il m'a permis de surmonter les difficultés d'interprétation de tant d’éléments épars dont beaucoup sont seulement pressentis et de comprendre la légende qui en est née.
Maître Jacques est en effet le fondateur légendaire d’une partie des Compagnons du Devoir. En 1731, le rituel des tourneurs de Marseille mentionne un Maître Jacques, mais sans plus. Un rituel des années 1800-1820, celui des compagnons tanneurs-corroyeurs du Devoir s’ouvre par cette invocation mystérieuse :
A vous tous, bons enfants
Respectez le Levant
D'où sort notre origine
Et Jacques d'Orient
Célèbre par ses talents
Mort dans la Palestine
Le mot saint n’est pas prononcé. Ce Jacques d’Orient, les Croisés l’ont rapporté, avec des légendes qui sans doute ont servi à étayer celle des apôtres Jacques.
L'article de Laurent Bastard sur le premier site de la Fondation (2006) sera accessible demain avec la suite des relations entre le Compagnonnage et Compostelle.