Au Jourdain
…
Il se mit à genoux et je lui jetai de l'eau sur sa tête et il fit de même pour moi. Nous en avons bu par dévotion.
Après, Dieu soit loué, nous sommes arrivés au fleuve de Jourdain, au soleil couchant. De Jéricho jusqu’au fleuve, il y a environ 3 lieues de ce pays [15 km. environ]. C’est le désert.
Arrivés là, tous les trois nous nous sommes mis tout nus et nous sommes baignés. Je me souvenais fort bien de la défense qui nous avait été faite car je n’entrai plus avant qu’à mi-jambe et là, je me couchai à plat, avec l’eau qui me couvrait tout le visage et le corps.
Le laquais nommé Jop me dit :
« Jean, il convient que je sois votre parrain et vous le mien ». Le laquais nommé Jop me dit :
Il se mit à genoux et je lui jetai de l'eau sur sa tête et il fit de même pour moi. Nous en avons bu par dévotion.
Instant de communion à l'eau du Jourdain
Après, l'un de nos Arabes me dit :
- « Chrétien, donne-moi de cette eau à boire ».
- « Chrétien, donne-moi de cette eau à boire ».
Et je pris mon plateau auquel nous avions bu et lui donnai de l’eau. Et quand il tint le plateau, il se mit à genoux sur la digue du fleuve, haute de 3 pieds. Tenant le plateau à deux mains l’Arabe dit ses oraisons pendant longtemps, puis il but l’eau et me rendit mon plateau.
Retour mouvementé à Jéricho
En approchant de Jéricho, les garçons nous entendaient venir à cause du bruit de nos chevaux. Ils venaient sur les chemins et, quand ils nous voyaient, nous jetaient des pierres à la tête. Quand nos Arabes pouvaient les attaquer en poussant leurs chevaux, ils leur donnaient 3 ou 4 coups de lances ou javelines. C’était magnifique ! [...] Vers 10 à 11 heures du soir nous sommes venus loger dans une grande ferme. Hommes, femmes et enfants de la cité venaient nous voir, ils nous regardaient et se moquaient de nous, surtout les enfants qui criaient et nous jetaient des pierres. C’était étonnant ! Nous avons pris nos besaces et nos trois bouteilles dont deux étaient pleines d'eau du fleuve et l'autre pleine de vin. Nous avons fait allumer nos chandelles de cire et les avons attachées contre un mur. Nous avons coupé en petits morceaux une partie de notre pain et nous les avons donnés aux enfants qui, immédiatement se sont tenus cois.
Coeur à coeur muet
Nous avons commencé à souper et les enfants se sont assis autour de nous et nous regardaient. Une femme s’approcha de moi en me regardant. Je lui donnai du pain et du fromage qu’elle mangea volontiers ; je lui donnai à boire dans mon hanap d’étain mais elle fit une moue si laide que c’était amusant ! Un peu après je lui redonnai du pain et du fromage et aussi du vin à boire dont elle fit une moue comme elle avait fait la première fois. Un peu après la femme s'en alla et puis s'en revint s’asseoir encore plus près de moi qu'elle n'avait fait auparavant ; elle me prit par la main le plus secrètement qu'elle pouvait et me mit dans la manche de ma robe qui était faite à la mode d'Allemagne à fort larges manches, trois fort belles pommes de grenade dont je m'émerveillai fort. Je lui en sus bon gré, je lui redonnai du pain, du fromage et aussi du vin à boire et puis elle s'en alla et ne la vis jamais plus. Dieu lui donne sa grâce.
Nuit écourtée et retour à Jérusalem
Peu après nous avons rendu grâces à Dieu, éteint nos chandelles et mis nos têtes sur nos besaces pour nous reposer un peu. Nos Arabes qui étaient loin de nous et qui avaient soupé par terre sur un tapis à la mode du pays, rendirent grâces à Dieu. Je les vis car je ne dormais pas et ils étaient fort dévots à regarder.
Ce jour-là nous avons bien été 10 heures ou plus à cheval ; nous étions très las, mais pas épuisés. Nous nous sommes reposés un peu et, vers une heure après minuit, nos Arabes nous ont fait demander s'il ne nous semblait pas trop tôt pour monter à cheval. Nous avons répondu que non et nous fûmes prêts en même temps qu’eux car nous ne désirions rien tant que d'être à Jérusalem.
Ce jour-là nous avons bien été 10 heures ou plus à cheval ; nous étions très las, mais pas épuisés. Nous nous sommes reposés un peu et, vers une heure après minuit, nos Arabes nous ont fait demander s'il ne nous semblait pas trop tôt pour monter à cheval. Nous avons répondu que non et nous fûmes prêts en même temps qu’eux car nous ne désirions rien tant que d'être à Jérusalem.
Extrait du Voyage de Jean de Tournai,
de Valenciennes à Rome, Jérusalem et Compostelle
(éditions La Louve, Cahors, 2012, pages 248-250)
de Valenciennes à Rome, Jérusalem et Compostelle
(éditions La Louve, Cahors, 2012, pages 248-250)